Le télétravail peut-il tenir dans la durée ?

Le déconfinement progressif constitue une zone de turbulence sans équivalent dans l’histoire récente, en particulier dans le monde du travail. Les DRH sont aux avant-postes pour piloter la reprise d’activité avec l’obligation légale de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs », en évitant le plus possible à leurs salariés l’exposition aux risques et en évaluant ceux-ci régulièrement.

L’adaptation nécessaire des locaux aux nouvelles exigences sanitaires représente un défi considérable avec, notamment, la mise à disposition de gels hydroalcooliques, masques ou gants, des marquages au sol pour faire respecter la distanciation, le nettoyage renforcé (en particulier de toutes les zones de contact régulier), l’ajout de séparations dans certains open spaces, la gestion des déplacements (limitation du nombre de personnes dans les ascenseurs, sens unique dans les couloirs étroits par exemple), la fermeture des cafétérias, salles de repos et autres espaces communs conçus pour favoriser la collaboration et la proximité.

L’organisation des rythmes de travail est aussi repensée afin de limiter les contacts physiques entre les personnes, avec la mise en place de dispositifs d’horaires décalés et de rotation des équipes, en évitant que celles-ci ne se croisent. Certains employeurs vont même nettement plus loin avec des prises de température systématique (Amazon, Veolia), des campagnes de tests (Toyota) ou des applications de tracking des interactions entre employés au sein de l’entreprise (PwC aux Etats-Unis).

Les mesures de prévention, et les contraintes qui les accompagnent, sont visibles de tous… Qu’en est-il dans le cadre du télétravail ?

Les risques psychologiques en sont connus, notamment le sentiment d’isolement et l’effacement de la frontière entre vie professionnelle et vie privée. Le travail à distance s’effectue parfois dans des conditions matérielles inadaptées, du fait du manque de place à son domicile, de la garde d’enfants ou d’outils informatiques peu performants.

Le recours maximal au télétravail semble pourtant la solution privilégiée pour les prochains mois. Il constitue une solution de repli, déployée à marche forcée dans la majorité des cas. Les contraintes pesant sur les télé-collaborateurs et les télé-managers sont moins apparentes que celles des personnes qui ont repris le chemin du bureau. Elles n’en demeurent pas moins réelles et peuvent provoquer une moindre cohésion des équipes, une diminution de la motivation et de la productivité.

Le programme de recherche <Best-in-Class Experience > d’Augmented Talent permet de cerner les spécificités du télétravail à temps complet. Il apparaît que la qualité du vécu professionnel est inférieure à la moyenne des salariés en France alors que celle en télétravail partiel est particulièrement positive.

Différents sondages mettent par ailleurs en évidence les signes de détresse psychologique qui se sont accumulés pendant la période de confinement. Près d’un télé-travailleur sur deux est concerné. La situation des télé-managers est encore plus préoccupante avec un tiers d’entre eux qui présentent des signes graves.

 Le temps de l’évaluation de la télé-expérience du travail est arrivé. Il s’agit de donner le même niveau de priorité à « la santé physique et mentale » de l’ensemble des salariés d’une part et de piloter la reprise d’activité d’autre part.